Le Chemin des Dames
Le Chemin des Dames, une décision catastrophique.
Nous sommes le 6 avril 1917. Le général en chef Robert Nivelle a été nommé en décembre 1916 pour préparer une attaque massive au printemps 1917. Il a prévu d’attaquer avec 800 000 hommes et 3 000 canons le 16 avril au Chemin des Dames. Depuis que le plan est divulgué, beaucoup d’officiers et de généraux ont fait connaître leurs réticences au gouvernement. Le ministre de la Guerre, Paul Painlevé, récemment nommé à la suite de la démission de Lyautey – qui ne croyait pas lui non plus au plan Nivelle – a clairement pris parti contre le plan Nivelle, après une enquête approfondie. Le président de la République Raymond Poincaré, lassé de ces débats et disputes qui affaiblissent l’armée et le commandement, a convoqué une ultime réunion pour débattre et décider de lancer l’attaque ou pas.
Un dialogue tendu où le destin de la France se joue dans une décision incertaine.
PAINLEVÉ, à Poincaré
Monsieur le président de la République…
POINCARÉ
Café ?
PAINLEVÉ
Merci. Monsieur le président, je vous suis reconnaissant d’avoir organisé cette réunion à quelques jours de l’éventuel déclenchement de l’attaque du Chemin des Dames.
POINCARÉ
Je ne sais s’il y a lieu de s’en réjouir, monsieur le ministre de la Guerre. Mais il le fallait. Votre opposition au général en chef est devenue publique, la Chambre ne parle que de cela. Un peu de café monsieur le président du Conseil ?
RIBOT
Non merci. (Un temps) Oh pardon. Ça, la Chambre est très nerveuse.
PAINLEVÉ
Trois ans de guerre ! Qui aurait pu imaginer cela en 1914 ?
POINCARÉ, il goûte le café
Il est tiède. (À Painlevé). Loin de moi l’idée de vous faire des reproches, monsieur le ministre, mais si vous connaissiez l’art de la guerre aussi bien que les mathématiques…
PAINLEVÉ, qui l’interrompt
Je sais, la victoire serait acquise.
POINCARÉ
En effet.
PAINLEVÉ
Il n’est pas facile de discuter avec le général Nivelle. Même pour vous.
POINCARÉ, à Ribot
Vous n’avez jamais apprécié ni même soutenu notre nouveau général en chef, monsieur le président du Conseil. (À Painlevé) Café ?
PAINLEVÉ
Non merci. Monsieur le président de la République, je ne suis ministre de la Guerre que depuis trois semaines. Je n’ai guère eu le temps de prendre Nivelle en grippe. Mais il se trouve…
POINCARÉ qui l’interrompt
Il se trouve, Painlevé, qu’en trois semaines, vous avez eu le temps de déstabiliser le commandement. (…)