De la défaite du travail à la conquête du choix
Une vue élargie sur la question du travail et du chômage.
La thèse défendue par les deux auteurs n’est pas spécialement nouvelle : selon eux, le travail n’a plus, dans la société, le caractère central qu’on veut lui donner. Mais le ton, lui, tranche avec ce qu’on a lu sur le sujet. Ils s’attachent à montrer que, loin de lutter contre le chômage, on a surtout fait tout ce qu’il fallait pour l’augmenter. Autre constat iconoclaste : c’est parce que le travail est de moins en moins partageable, constatent les auteurs, qu’il y a de plus en plus de chômage : il serait donc absurde de décider de le partager par une loi. C’est prétendre soigner une maladie par sa cause. Décapant.
Le travail est en mutation et on le considère comme immuable. Toute évolution de la société semble arrimée à un invariant : le travail. Tout peut changer pourvu que le travail demeure. Il faut revenir à l’organisation des années soixante, au plain-emploi, au salariat, au statut auquel on élève une statue. Depuis qu’historiquement le travail apparaît comme l’élément central de la dynamique de la société, il est traité comme un absolu – ce que l’on doit conserver à tout prix – au même titre que la vie.
Mais cette volonté de sauvegarder à tout prix le travail comporte au moins quatre inconvénients qui ne sont pas bien perçus et moins bien encore évalués. La volonté de sauvegarder le travail est déprimante, irréaliste, myope et coûteuse. En sacralisant le travail, nous sombrons dans la nostalgie. C’était mieux avant. Nous coupons l’élan et la perspective. L’avenir perd son attrait et la société se complaît dans une vision déprimante d’elle-même. La dépression psychologique engendre des anticipations négatives qui se traduisent en dépression économique. Prétendre sauvegarder le travail à tout prix, c’est faire peu de cas des perspectives historiques. C’est ajouter la myopie à l’irréalisme.
